Voici les témoignages prononcés le vendredi 24 octobre 2014 au Temple de la Rue Maguelone lors du temps fort de la Réformation : « Témoigner sa foi aujourd'hui », « La foi qui déplace les montagnes » et « Je t'ai appelé par ton nom ».

 

Témoigner sa foi aujourd'hui
Le jeune homme riche (Matthieu 19 versets 16 à 26)

Voilà un jeune homme riche, de haute moralité, croyant mais angoissé. Malgré sa bonne situation et tous ses efforts pour être vertueux il ressent un manque en lui qui l 'empêche d'être en paix. Convaincu de sa bonne conduite, il affirme à Jésus qu'il respecte tous les commandements de la Loi. Pourtant cela ne suffit pas à le rassurer ; il sait que quelque chose lui échappe.

On comprend qu'il est captif de ses possessions matérielles mais aussi de ses certitudes et de son autosatisfaction. Lorsque Jésus lui révèle qu'il ne peut atteindre le Royaume de Dieu qu'en donnant ses biens aux pauvres et en le suivant, le jeune homme s'effondre et part. Il n'est pas prêt à quitter ce qui pourtant le perd. Il n'est pas prêt à remettre sa vie en question. L'appel du Christ, bien que radical et effrayant, est une invitation à la prise de conscience.L'être humain par sa nature et de surcroît lorsqu'il détient des richesses, ne peut atteindre un tel renoncement. L'accès à la perfection par ses seules actions est impossible.

Néanmoins notre impuissance, que révèle Jésus aux disciples, est renversée par l'affirmation finale qu'avec Dieu tout devient possible. Se dépouiller du superflus et venir à Jésus c'est prendre conscience de son esclavage intérieur et aspirer à s'en libérer. Jésus invite à renoncer à l'illusion de toute puissance afin de s'ouvrir à la miséricorde et à la Grâce de Dieu. Ainsi, la réponse du Christ est un appel d'amour qui s'adresse à tous. Il nous offre de nous reposer en Lui, fidèlement, pas avec nos seules forces mais avec la force de Dieu qui se déploie dans la faiblesse.

Ce jeune homme riche existe en chacun d'entre nous. En effet, nous sommes porteurs de cette même contradiction entre aspiration à suivre Jésus et impossibilité à en assumer les conséquences dans notre vie. Nous nous rassurons par l'observance de commandements et de rites pour oublier que nous ne maîtrisons rien. Or plus nous tentons de nous rapprocher de Dieu par les oeuvres, au prix d'efforts considérables, plus cette voie nous apparaît inefficace et interminable.

En fait l'homme n'a rien à offrir en échange de sa vie, vouloir la sauver est le meilleur moyen de la perdre. Ce qui nous déroute tant c'est d'entrer dans une logique nouvelle. Il ne s'agit plus, comme nous en avons l'habitude, d'agir pour obtenir ou de mériter pour bénéficier en retour. On ne se sauve pas soi-même.

Alors que faire ? C'est aussi la question que pose notre jeune homme... Et bien rien justement. Il ne s'agit pas de faire mais de croire. Seule la foi en la mort rédemptrice de Jésus permet la réconciliation avec Dieu et l'accès à Son Royaume.

Dans ce texte Jésus adresse à chacun d'entre nous un message personnel fondamental : Il faut faire de la place dans nos vies pour accueillir la Grâce. C'est aussi ce que nous dit la première des Béatitudes : « Heureux les pauvres en esprit car le Royaume des Cieux est à eux. »

Avec l'aide de Dieu, tendons vers cette disposition intérieure d'humilité, de confiance et d'espérance à laquelle invite le Christ. Résistons à l'envie de fuir, comme le fait notre jeune homme riche, pour au contraire accueillir cette parole d'amour et de réconfort, et ainsi nous ouvrir à la Grâce de Dieu.

LE (24-10-2014)

 

La foi qui déplace les montagnes

On m’a demandé de choisir un texte biblique et de le présenter. J’ai choisi un texte qui se trouve dans l’évangile selon Matthieu au chapitre 17. Dans ce chapitre l’évangéliste nous raconte que les disciples ont subi un échec. En effet en l’absence de Jésus ils n’ont pas réussi à guérir un malade qu’à son retour Jésus a très facilement guéri. Alors Jésus a dit à ses disciples : « Si un jour vous avez de la foi, seulement gros comme une minuscule graine de semence de moutarde, et que vous dites à cette montagne :

" Déplace-toi d’ici là-bas ", eh bien, elle se déplacera ».

J’emploie souvent ce texte quand j’ai quelque chose à faire, surtout quand il s’agit de quelque chose de compliqué ou d’important. Mais l’emploi de ce texte dans ce cas pose plusieurs questions. D’abord où se trouvent les montagnes qu’il faut déplacer quand nous voulons réaliser quelque chose ?

Il y a d’abord des montagnes qui se trouvent à l’intérieur de nous, et ce sont souvent les plus importantes. Ainsi quand nous avons quelque chose de difficile ou d’important à faire, il nous faut d’abord bien réfléchir pour bien connaître la tâche à accomplir. Et puis, quand l’action a commencé il y a toujours des obstacles et des difficultés, souvent imprévus, qui surgissent. Il faut alors de la ténacité, de la volonté, de la détermination et du courage pour réussir notre tâche.

Ensuite il y a des montagnes extérieures qu’il faut déplacer. Ici je vais prendre un exemple qui n’est pas biblique. Les Etrusques avaient assiègé Rome et étaient sur le point de donner l’assaut final. Alors le Romain Mucius Scevolanus est allé dans le camps étrusque et devant tous les Etrusques il a mis sa main dans le feu d’un brasier en disant : « Des centaines de Romains courageux et déterminés comme moi vous attendent. » Quand l’odeur de la chaire brûlée se répandit dans le camp, les Etrusques, complètement médusés, ont levé le siège de Rome et depuis tout le monde sait combien la détermination et le courage déplacent aussi les montagnes extérieures. Les montagnes à déplacer de notre texte sont pour moi : la bonne maîtrise : de la connaissance de la tâche, de la ténacité, de la détermination et du courage.

Une deuxième question que pose notre texte concerne la petite graine de foi dont parle Jésus. Nous tous, comme la plupart des gens, nous avons quelque part en nous une petite graine, parfois minuscule, de croyance en Dieu. Ne nous faisons pas d’illusions sur la grosseur de notre graine personnelle, Jésus n’a pas tord de parler d’une minuscule graine. Mais justement Jésus dit aussi que cette minuscule graine est suffisante pour déplacer les montagnes. Alors qu’est ce que cela nous coûte de mobiliser cette minuscule graine quand nous avons vraiment de grosses difficultés ? Qu’est ce que cela nous coûte de mobiliser cette minuscule graine pour nous aider à prier notre bon Père qui est aux cieux, même si nous n’avons pas l’habitude de prier et même si notre prière n’est pas tout à fait dans les normes des églises.

Ensuite il y a une troisième question qui se pose souvent à propos de notre texte. Cette question est : « Jusqu’à quel point pouvons-nous utiliser la violence pour faire ce que nous avons à faire ? ». Il y a de nombreux récits de violence dans la bible. Nous prendrons l’exemple de Jésus qui a chassé les marchands du temple. Il a manifestement employé pas mal de violences verbales et aussi de violences physiques. De leur côté les marchands n’étaient certainement pas des anges mais ils étaient indispensables pour que tous les fidèles puissent satisfaire à leurs prescriptions religieuses obligatoires. Il y a bien sûr des limites à la violence. Jésus nous a, par exemple, donné un commandement fondamental qui dit : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Dieu peut aussi nous aider à équilibrer nos actions entre le « tu aimeras ton prochain » et le « comme tu t’aimes légitimement toi-même ».

Enfin dernière question : La foi en Dieu nous fait-elle toujours réussir ? Souvent oui, mais hélas, parfois non, et cela pour beaucoup de raisons. Par exemple parce que souvent nos actions gênent, ou même lèsent, d’autres personnes qui sont elles aussi des enfants de Dieu au même titre que nous.

Mais c’est peut-être en cas d’échec de l’une de nos actions, que le dialogue intérieur avec Dieu est le plus important. Il nous permet de garder confiance en nous-mêmes et foi en Dieu. Cela nous permet aussi de réfléchir sereinement à ce qui n’a pas fonctionné en cas d’échec et aussi à réfléchir à comment mieux faire la prochaine fois.

RM (24 octobre 2014)

 

Je t'ai appelé par ton nom

Nous lisons dans le livre d’Esaïe, au chapitre 5, verset 4 : « Je t’ai appelé par ton nom »

bookIl y a quelque chose d’étrange à lire ce passage de l’Ancien Testament dans ce petit volume intitulé Nouveau testament  et  Psaumes ; mais voila, il s’agit d’une inscription manuscrite portée par un pasteur à l’occasion de ma confirmation. Ce livre m’accompagne donc depuis très longtemps, mais il m’a fallu l’exercice d’aujourd’hui pour que je me rende compte que ce verset disait assez bien ma relation à Dieu.

« Je t'ai appelé par ton nom » : une voix s'élève pour inaugurer une relation duelle, intime, interpersonnelle entre un « je », Dieu, et un «tu », moi ; Dieu prend l'initiative : il ne parle pas seulement, il appelle ; c'est-à-dire qu'il attend une réponse, qu'il souhaite susciter une réaction. La phrase est au passé et il s'agit pour moi d'un souvenir, donc d’un passé recomposé. Comme je ne suis ni Blaise Pascal ni Paul Claudel je ne peux pas dire : il m’appela à un moment précis -je peux seulement affirmer : c'est à cette époque que j'ai pris conscience que Dieu existait pour moi personnellement, et qu'il désirait une réponse de ma part.

On oublie trop souvent aujourd’hui que le temps grammatical du passé composé est aussi une certaine forme de présent : dire « nous sommes entrés dans ce temple à 16 heures » situe certes cette action dans notre passé mais explique aussi que nous sommes dans ce temple depuis 16 heures. L’action ou l’événement est passé mais il continue à avoir des répercussions aujourd'hui, explique éventuellement un état présent. Ainsi le « je t’ai appelé » vise t’il à toujours avoir des effets aujourd’hui … comme le fait que je me retrouve ici devant vous.

appel« Par ton nom »: cela témoigne, bien sur, que Dieu connaît chacun de nous personnellement mais c'est aussi pour moi un gage d'authenticité. Ce n’est pas comme ces appels téléphoniques où, parce que mon correspondant écorche mon nom dès la première phrase, je sais qu’il n’en veut qu’à mon argent ; Dieu a de vrais projets pour moi et lui m’appelle par mon vrai nom.

Peut-être avez-vous remarqué que «  Je t'ai appelé par ton nom » peut signifier : je t’ai attribué ce nom. J’avoue que, quand cette interprétation vient de quelqu’un qui se prénomme Christian, elle peut sembler, présomptueuse ; alors surtout ne pensez pas que j’affirme qu’il faut s’appeler Christine ou Christiane pour être chrétien, que seuls les Bénédicte ou Benoit sont au bénéfice de la bénédiction divine ni que Dieu réserve son amour aux Théophile ! Mais ne peut-on imaginer qu’au moment où nos parents nous ont choisi un prénom, celui que nous appelons notre père ne leur a murmuré quelque chose à l’oreille ?

Voila ! J’espère que vous n’avez pas cru avoir devant vous quelqu’un qui raconte avoir entendu une voix éclatante lui ouvrir un chemin de lumière jalonné  de certitudes. Ma foi est incertaine, faite d’ombres et de lumière et d’ailleurs l’inscription en témoigne : il manque un « p » à « appelé » et la référence est erronée : Es.45,5 au lieu de 45,4 : deux erreurs en si peu de mots ; vraiment, quand il s’agit de ma vocation, on est bien loin de la perfection !

CS (24 octobre 2014)