« Religion, superstition et foi » par André Gounelle dans le CEP le plus récent (no. 589, octobre 2015). En exclusivité pour et en libre accès  sur le site de l'Église Protestante Unie de Montpellier & Agglomération. Cet article fait partie du dossier spécial de ce mois du CEP: « on croise les doigts, sur la ligne de crête entre superstition et religion ». À part de ce dossier il faudra feuilleter et approfondir les articles tout-à-fait interessants comme: Le lien entre Protestant et Juifs, GPS Cheminer ensembleQue retenir des objectifs du Millénaire, toute l'actualité régionale protestante, et beaucoup d'autres articles. Le CEP est le mensuel d'information de l'Église Protestante Unie en Cévennes-Languedoc-Roussillon. Lisez l'article d'André Gounelle et trouvez toute information pour s'abonner au CEP ici.

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L'article de ce mois en exclusivité pour l'EPUMA:

 

Religion, superstition et foi

par: André Gounelle, théologien

La relation entre religion et superstition est complexe. En quoi se rapprochent-elles et s'opposent-elles ? Les trois réponses à cette question se combinent et montrent que la frontière entre les deux se franchit facilement. Mais la religion donne les moyens de lutter contre la superstition.


Tout d'abord, l'Antiquité voit dans la superstition une religion outrancière et excessive ; c'est d'ailleurs, peut-être le sens étymologique du mot, " super " indiquant une hypertrophie. Elle est une croyance qui va au-delà de ce qu'exige le culte officiel, contrôlé et canalisé, de la Cité.
Ensuite, pour les Réformateurs, la superstition est une religion idolâtre qui divinise des réalités du monde. Ainsi, ils jugent éminemment superstitieuse la croyance que l'hostie consacrée est matériellement « corps du Christ »  et non pas signe sensible d'une présence spirituelle.
Et enfin, selon des philosophes tels que Locke et Kant, la superstition se définit par une conception magique et irrationnelle de la causalité, alors que la véritable religion se veut " raisonnable ". La foi ne se confond certes pas avec la raison, mais à la différence de la superstition, elle ne la disqualifie pas ; elle la respecte et lui reconnaît un domaine propre.
Entre religion et superstition, la frontière se franchit facilement. Ainsi, pour la foi, Dieu intervient dans notre vie ; le superstitieux s'imagine qu'il agit en opérant des guérisons miraculeuses en certains endroits (sanctuaires ou lieux de pèlerinage) ou à travers des rites spéciaux (imposition des mains et formules pieuses). Pour la foi, la Bible transmet la parole de Dieu ; la superstition ouvre les Ecritures au hasard pour y découvrir ce qu'il ordonne de faire en tel cas précis, de même que pour les augures latins les entrailles des animaux révélaient la volonté divine.


Aimer Dieu de toute notre pensée
La religion combat les dérives et délires de la superstition de deux manières.
D'abord en soulignant la transcendance et l'altérité de Dieu que le croyant, sensible à juste titre à sa présence, a tendance à oublier. Dieu est à fois intime et différent. Il est proche, mais ne se confond pas avec notre monde. Seul il est divin, seul il est saint, comme le répète inlassablement Zwingli. En dehors de lui, il n'y a que du profane, du séculier ou du laïc. Mêler au naturel du surnaturel revient à diviniser indûment des réalités qui n'ont en elles rien de magique ni de sacré, même quand elles témoignent de Dieu (c'est le cas des Ecritures ou des sacrements).
p0810Ensuite, en encourageant et en aidant le développement d'une foi pensée et réfléchie qui ne sera pas moins vive et ardente, mais qui sera plus solide, plus équilibrée, plus profonde. Elle s'immunisera ainsi contre les déviations qui la menacent, y compris celle de la superstition. On objecte parfois à de tels propos que Paul présente la foi comme une folie qui déborde et contredit la « sagesse du monde » ; mais, ce faisant, Paul ne légitime nullement, bien au contraire, la recherche de prodiges et de miracles dont la superstition est friande (1 Corinthiens 3.21-22). Ailleurs, il recommande un « esprit de sagesse » (Ephésiens 1.17) ; il rejette non pas la sagesse en tant que telle, mais une certaine forme de sagesse. Lorsqu'il nous demande d'aimer Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme et de toute notre force, Jésus prend soin d'ajouter au texte de l'Ancien Testament qu'il cite (Deutéronome 6.5) « de toute notre pensée ». Cultiver une foi pensée et réfléchie éloigne des croyances superstitieuses.